et alors

Pour l'Art Contemporain Artistes Archives Alentours À lire Liens Contact

w

Jean-Pierre NADAU
Dessin Gravure


↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓
Jean-Pierre NADAUblancJean Pierre NadaublancNadaublancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJP NadaublancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre Nadaublanc© Jean-Pierre Nadau
 
Né en 1963 à Melun, vit et travaille à Morillon en Haute-Savoie
1982-1985  École de théâtre Charles Dullin à Paris
 
          Notre premier contact avec l'oeuvre de Jean-Pierre Nadau remonte à l'année 2001 où l'exposition Noir sur Blanc Mondes Intérieurs installée à la Halle Saint-Pierre de Paris nous a positivement marqués.
En 2003, le temps passant l'artiste nous écrivait à propos de l'exposition consacrée à Josette Rispal (un tout autre monde intérieur très coloré) et que nous présentions à Lyon durant la Biennale d'Art Contemporain. En 2005, c'est à Jean-Pierre Nadau d'investir l'espace de la galerie Trait Personnel avec ses oeuvres grouillantes et fantastiques. Sa plume Sergent Major, une fois encore, signera !
          Yvonne Ravachol-Bonhomme
 
 
↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓
          Une partie des homo sapiens construit un cocon gigantesque, de plus en plus complexe et en prolifération constante. Ils ont cyniquement raison de ne pas tenir compte de l'autre (énorme) partie qui agonise, car les pauvres ne génèrent aucunes fluctuations alarmistes sur les marchés boursiers. Même l'épouvantail médiatique du terrorisme semble assimilé, statistiquement et psychologiquement maîtrisée ou tout du moins gérable par les nouvelles générations conquérantes. Des bébés américains doivent déjà s'amuser à faire tomber des piles de cubes en regardant le DVD de leurs parents où l'on voit la destruction des tours de New York.
Mais dans l'aveuglement vaniteux de son intelligence supérieure, l'homme néglige à tort certains paramètres qui pourtant le menacent inexorablement, les insectes en font partie...
Cela fait plus de quatre cent millions d'années qu'ils sont installés sur terre. Ils ont résisté à toutes les catastrophes, vaincus tous les périls, bravés tous les dangers et continués à se multiplier devenant vite, et de très loin, l'espèce animale majeure.
L'humain n'est que récent et provisoire, un simple grand singe macrocéphale parcimonieusement réparti sur la planète. Or, si la violence industrielle incessante devient responsable d'une calamité écologique, dont la disparition de milliers d'espèces d'insectes, certains de ces derniers au contraire commencent à profiter des nouvelles conditions imposées par l'humain pour pulluler de façon monstrueuse. Le réchauffement climatique s'accentue, et ces petites bêtes que l'on méprise tant vont s'adapter bien plus vite que nous aux moiteurs chimiques.
Les moustiques répandront plus équitablement dans les deux hémisphères, paludisme, dingue, fièvres jaunes et autres virus encore inconnus ; l'immigration massive des criquets et chenilles africaines vont irrémédiablement ravager nos cultures ; les termites seront de plus en plus voraces avec nos logements, les blattes et autres rampants de l'ombre seront responsables de cruelles dégradations sanitaires, de nouveaux hybrides, hyper agressifs, d'abeille et de guêpe au venin mortel envahissent nos riantes campagnes, les super colonies de fourmi belliqueuse vont s'étendre...
Ce rapide accroissement thermique artificiel, inédit, renforcera la vitalité et la résistance de ces bestioles pour s'accommoder de n'importe quels insecticides et bientôt, les pauvres grands cons de singes que nous sommes en crèveront. Sous un ciel bourdonnant et noir, nos chairs putréfiées feront alors le régal de nécrophores mutants aux mandibules géantes.
Ce scénario catastrophe et néanmoins plausible, surtout associé à d'autres facteurs aggravants, me sert de base pour cette exposition. Mes dessins ne sont pas descriptifs de situations réalistes. Ils ne reflètent qu'une ambiance fantastique, avec une précision de multiples détails proliférant, parfois totalement incongrus, qui caractérisent mon style graphique et s'adaptent bien à ce sujet.
La plus grande toile, Mythologie des trois hippodromes infernaux, bien plus ancienne (1994), n'a pas été conçue autour de ce thème, mais s'y rattache car elle symbolise l'instinct de mort et sa structure d'ensemble fait étrangement songer au Grand-Paon-de-Nuit.
          Jean-Pierre Nadau


          ...Ses œuvres toutes en accumulation de personnages, d'historiettes fantastiques et de rappels historiques sont étonnamment bien construites. Trait d'une justesse exceptionnelle, graphisme déroutant par sa rigueur farfelue, incroyable par sa technique euphorisante.
Là, où les prouesses techniques devraient apparaître, elles cèdent la place, dans l'oeil du spectateur, à un humour, une vitalité et un bonheur de créer généreux et hors de tout contrôle.
Un plaisir rabelaisien, une ironie et un sarcasme qui donnent à cet artiste toute sa
singularité.
          Justine Flandin

↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓
Jean-Pierre NadaublancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblancJean-Pierre NADAUblanc© Jean-Pierre Nadau
↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓
L'imaginaire grand format

L'œuvre de Jean-Pierre Nadau témoigne du jour des images, de leur liberté, de leur abîme et de leur inconnu. Piéton de Paris caché dans les montagnes de Faucigny l'artiste dessine de manière compulsive sur des grands formats des sortes de plans de ville et des pictogrammes complexes et fascinants ou tout un monde s'anime nourri de réminiscences diverses. S'élabore et rayonne le réseau de récurrences progressives (films, lectures diverses) en un univers où se croisent par exemple Jean Gabin sur un improbable champ de courses et des figures d'un S.F. encore ignorée.
L'amoncellement des détails crée des permanentes au chaos pour d'une certaine manière et comme disait Zazie dans le métro, « le rendre indéfrisable ». C'est un véritable plaisir que de se perdre dans un graphisme inépuisable. Chaque « planche » ou rouleau devient l'exacerbation d'un monde travaillée avec une précision extrême. Par le noir la vie grouille, scintille, animée d'une dynamique interne qui pourrait apparemment rapprocher ce travail de l'Art Brut même s'il en reste le parfait contraire.
Tout vagit, grouille et semble bouger dans d'immenses fresques et leurs cicatrices ouvertes sur le temps passé pour guérir le futur qui nous guette.
L'image s'ancre, les lignes cherchent les formes, défaillent, s'effritent de manière splendide : existe une danse extraordinaire de l'architecture en ce magma. La vie plus légère comme la plus sombre se gonfle pour inscrire un autre espace de la pensée, de la sensation.
Nul peut dire si nous sommes alors d'avant ou d'après la ruine ou le triomphe, nous regardons c'est tout. Chaque image flotte – rien ne sera stable et fixe. Puisque, et Nadau le rappelle, rien n'a jamais été vraiment, sinon dans notre imaginaire ; ici il ne possède pas de fond : c'est un vertige.
          Jean-Paul Gavard-Perret pour Carnet d'art septembre 2017


Nadau le "turfiféraire": une fièvre de cheval

          Tout dans les dessins de Jean-Pierre Nadau part des certitudes pour aller aux hypothèses les plus burlesques au sein de planches qui ouvrent le vendre de Paris. Dédié au mystérieux Noenoeil, sorte de nouveau cyclope dont on ne saura rien, Jockey Patron fait suite aux Turlupointus et à Ca veut rire à Longchamp pour Frédo le Stéphanois et nous plonge dans l'univers du turf parisien. C'est donc un Paris populaire et gouailleur qui se saisit par la bande là où il n'est pas question de réalisme où de ce réalisme particulier qui revisite à sa manière et sous couvert des films dialogués par Audiart un univers fantasmatique qu'on à tord de réduire à un parangon d'univers adjacent : ceux de Willem et de Dubout. Avec Nadau nous ne sommes jamais dans le tissé en dépit des effets de plans mais nous entrons dans un labyrinthe délirant qui avant de nous présenter un miroir de Paris nous accorde la pure contemplation d'un langage iconique proche de l'art brut, mais d'un art brut qui relève de la conscience et de la stratégie drôlatique. Chaque planche de Jockey patron devient ainsi une sorte de cérémonial étrange et bourré d'humour dans ce qui tient moins de la quête nostalgique d'un par(ad)is perdu que d'une reconquête et d'une autre appropriation des lieux. Plus qu'un moyen de réparer le temps qui s'écoule, de le "suspendre" comme suspendre la mort qui se répète dans chaque évocation des figures tutélaires évoquées, on rentre ainsi en une sorte de passage à travers les jeux infinis des lignes dans leurs ordonnancements. Il existe dès lors un retournement entre deux abîmes là où l'œuvre impose son instable stabilité. On va ainsi vers un savoir original, là où dans sa majesté dérisoire et dégingandé le dessin impose une Loi - le sens d'un destin ? - au moment où le dessinateur réinsère le fétichisme de l'art. Mais dans le corps de les planches (le corps du délit) s'il existe un savoir il n'y aura pas de réponse. Juste - et mieux : un écho où pénètre quelque chose de l'ordre du plaisir, où le désir de durer à travers le temps s'engouffre sans que jamais celui qui regarde puisse devenir voyeur tant Nadau en dressant ses passages ménage aussi une suite d'impasses.
          À ce point il ne faut même plus chercher à comprendre ce que ça cache, il convient de se laisser prendre, se laisser perdre à perte de vue dans l'espoir de trouver la bonne distance au regard dans l'espoir d'entrer dans les planches de " Jockey Patron " comme si on entrait dans les ordres (du désordre). Demeure ainsi quelque chose de la grâce et de la souffrance dans ce qui paradoxalement est tout sauf un jeu de dupes puisqu'à travers lui on peut tenter de percer le mystère de l'image en éprouvant un sentiment d'identité mais dans lequel aucun narcissisme ne peut- être flatté puisque ce n'est pas" du " réel qui est représenté mais les images d'images reprises, contrôlées, détournées. S'érige de la sorte quelque chose d'édifiant, mais de souterrainement édifiant entre le noir et le blanc qui rappelle celui des films populaires français des années cinquante du siècle passé et qui permet de ne pas voir sur image mais à travers comment le turf inscrit sa propre histoire dans l'histoire de la capitale.
Et henni soit qui mal y pense.
          Jean-Paul Gavard-Perret


« Les Turlupointus » et « Exuvies »
          Voilà les titres faussement évocateurs de deux albums de dessins de Jean-Pierre Nadau, reçus durant l'année 2002. Des publications de cet artiste demeurent un événement important dans le monde de l'édition graphique en dehors de tout contexte ou étiquette que souvent l'on attribue aux diverses expressions artistiques. La première notion retenue, en examinant un des dessins édités, vu dans son ensemble ou dans un détail, c'est la découverte d'un imaginaire sans limite et sans cesse renouvelé. J'ai l'impression que chaque image en engendre des milliers. À travers cet ensemble de phénomènes qui constitue la vie, existe des périodes ou des lieux où l'on assiste à l'apparition d'un grouillement d'espèces nouvelles aussi bien dans le domaine zoologique que botanique. Comme si la Nature expérimentait dans toutes les directions possibles de nouveaux êtres ou végétaux adaptés à des multitudes de situations, pour en définitive atteindre un quelque chose qui nous échappe totalement. Pour faire face à l'inimaginable, l'inexplicable, on a inventé des théories, et même Dieu Il faut bien vivre l'esprit en paix sur cette terre lancée à vive allure à travers le cosmos.
          Cependant pour en revenir à ce processus de création permanente, nous remarquons qu'il y a des lieux privilégiés comme l'Amazonie ou des époques géologiques spécifiques où il a été plus marqué que d'autres. Il en va de même dans la biologie, où certaines lignées animales n'évoluent pas tandis que d'autres se perdent en une multiplicité de variations. Au niveau de l'homme et de ses possibilités imaginatives, il en va de même, certains individus font preuve d'une inventivité remarquable, sans cesse en mouvement et cela dans tous les domaines des activités humaines. D'entre elles, celle qui nous intéresse le plus ici demeure : la création plastique, apparemment gratuite dans sa finalité, opposée à celle scientifique reposant sur un imaginaire encadré par un maillage de règles, théorèmes, postulats, théories.
          Nous allons toujours de mystère en mystère. Dans une société donnée, pourquoi voyons-nous tel ou tel individu se « spécialiser » dans tel ou tel domaine ? Est-ce que notre société que nous pensons intelligente et possédant son propre arbitre, ne serait pas à l'image, bien sûr, plus sophistiquée, de certaines colonies d'insectes ? Pourquoi Jean-Pierre Nadau naît-il dessinateur ? Quel message ou quelle fraction du futur, consciemment ou non, révèle-t-il ? Est-ce que dans nos gènes nous portons tous une infime fraction du devenir de notre espèce, notre itinéraire dans le Cosmos ? Voilà donc une première réflexion qui s'impose à moi dès que je feuillette les premières pages de ces deux ouvrages : hiéroglyphes du futur !
          Jean-Claude Caire

         Loin des esthétiques à la mode, Jean-Pierre Nadau est un moine enlumineur qui couche sur le papier sa propre mythologie.
Recroquevillé sur sa (petite) table de travail, l'homme dessine, à la plume Sergent Major et à l'encre de Chine, sur chaque centimètre carré de rouleaux de papier mesurant parfois plus de dix mètres et qu'il déroule au fil de son ouvrage.
Le fait de n'avoir aucun recul ni vue d'ensemble ne l'empêche pas de composer ses dessins. L'immense « vue de Paris » exposée au Dernier cri est immédiatement identifiable, avec sa Seine, ses îles, ses quartiers… En s'approchant, on découvre une Babel aux architectures fantastiques, grouillant – littéralement – de monde : humains, mais aussi créatures hybrides et textes, inextricablement entrelacés et pourtant parfaitement lisibles. Il faut une bonne demi-heure pour faire le tour de cet univers aussi drôle qu'hallucinant.
Jadis disciple de Chomo, Jean-Pierre Nadau n'est pas classé pour rien dans la famille de l'art singulier, injustement boudée par les institutions d'art contemporain.
          
Emmanuelle Gal

« Neuve Invention »
          Sous la bannière «Neuve Invention», Jean-Pierre NADAU tisse depuis quelques années une gigantesque toile d'araignée où il capture de multiples fantasmes facétieux, des êtres aux datations diverses et douteuses, des cartographies initiatiques, des villes transparentes et dentellières, des gardiens ancestraux, des déités démodées et d'innombrables autres objets et personnages.
D'entre ces architectures sublimes, labyrinthiques, vertigineuses et subtiles, des tribus inattendues surgissent. Les plus déterminées affichent sur la façade du palais présidentiel, un gigantesque calicot : «le comptoir des géants», portrait de quelques anciens gouverneurs (...) et tout récemment un groupe d'incontrôlés annoncent une lancinante campagne publicitaire attirant l'attention sur «la mythologie des trois hippodromes infernaux».
Abandonnons l'imaginaire pour revenir sur terre. Alors, qu'elle n'est pas notre stupéfaction devant ces dessins époustouflants, fouillés et triturés à l'extrême, tout à la plume, dont certains mesurent plus de dix mètres de long multipliés par deux virgule quatre mètres de haut.
          Jean-Claude Caire

Voir dedans (fragments pour Jean-Pierre Nadau)
          Les traces. On ne les connaît pas — ou trop bien. Elless passent en marmottant. Chacune est isolée. Elles se sont réfugiées dans la page surpeuplée pour être encore plus seuls seules, pour exhaler sans se trahir ce qu’on a sur le cœur. Comme des exploratrices d’ici-même portant leur peau dans leur bagage mais aussi leurs pas et leur voix, oui, leur voix. Soudain quelque chose puis soudain rien, soudain que le silence. Le trou noir au milieu. Sans autre histoire que ce silence qu’elles ne peuvent plus rompre. Elles doivent juste durer.
Traces du passées, vieux songes, délires revisités et fantasmés qui reviennent ou qui surgissent frais comme des gardons. Nadau les dessine comme il les voit de ses yeux de dedans. Se répétant que ce qui ne va pas c’est toujours ce passé — d’où sa « rédaction », sa « prédication » de pasteur graphique et athée à travers ses signes et ses griffures.
Vers la première image et le trou noir dedans, comme miroir de la nuit par cette fenêtre (fermée-ouverte). Le trou noir de la mère dont, tout compte fait, on ne sort jamais.
      Première image partie, il faut construire des fresques afin de savoir comment c’était avant. Contre le noir impénétrable prendre celui du graphite pour reconstruire notre archéologie du savoir à coup de vieilles leçons d’Histoire (et leurs images) et de vieux films français (Ah les dialogues d’Audiard…) ou italien (ah le jeu de Vittorio Gasmann). Alors créer pour Nadau ce n’est plus la graphie sur le blanc mais la biffure dans le noir. Pour que les yeux se relèvent, vite, vite, et que les traces vibrent d’un bourdonnement d’insectes mais d’insectes qui ne disparaîtraient pas lorsque la lampe s’éteint.
          L’artiste du haut de la montagne où il s’est retiré cherche savoir comment c’était la passé. Il en suit les traces, différentes traces sans aucune préférence afin de reprendre sa propre histoire sur d’immenses toiles et mettre le doigt dessus comme au petit bonheur. Reprendre à partir de là, où se donne du champ (de course) à un jambage (de cheval).
      Paris s’éveille soudain du haut des Alpes : drôle d’endroit pour une rencontre mais qu’importe. Transferts, rattachements. Mais isolations idem. Dégustation en silence des séries, des cartes, des repères comme des mouvements qui reviennent, liés à un essieu de métro et du temps.
          L’image se multiplie, se densifie mais la scène reste vide. Quelque chose bée puis se scelle à nouveau. Dans le genre c’est bien.
          Traces des grands damnés, des grands acteurs et des mots illisibles bien plus que là où Dotremont les avait laissés. Peut-être pouvoir rêver du (bon) temps que leur valurent leurs errements dans les rues et les catacombes de Paris — pendant ce temps leurs démons se seront assoupis.
Dès lors poursuivre. Avidité de trait pour l’épuisement. Le renoncement toujours possible et qui ne l’est pas. Irrespirable tension (tentation) de la rupture. Nadau crayonne, monte, descend, piétine, sans demander pardon : trop longtemps rivé à cela, ce qu’il nomme « cette lâcheté sans nom ». Reprendre donc à reculons. Pour repartir.
          Pas de pardon, La trace ne dit rien qui vaille — sinon la peine de s’y attarder. Juste soulever l’absence. Voir dedans. Sans dire quoi. Cela achevé le dess (e) in. Le reprendre. Anales verticales en un sens. Mais les traces sans réponse. Et fourmis dans la main. À l’intérieur si loin. Tourner le dos à l’inachèvement pour révéler les failles. C’est ça. Comble du noir pour voir le jour. Cette peur de se faire peur que le noir comble. Noir de tombe donc mais pour ne pas y tomber. Traces – Paris est une fourmilière. Séries. Séries noires — c’est là que niche la douleur. On reste à sa lisière. Chemin de ronde. Périphérique. Étendue béante. Beaucoup de blanc encore. Répétition et demeure. Mais ne pas arrondir les angles : quand le corps ne ment plus il sort ses couteaux.
          Traces, zones, silence. Ce qui se déplie enfin. Le noir canarde une mythologie portative, déroulable. Là où le bât blesse la main passe et repasse. Afin que le mot cède et qu’on retrouve l’image. Paris s’éveille là où crisse la trace telle une bouche sans lèvres, sans moustaches. Juste l’absorption nécessaire. Pari. Poker. Turf. Le noir passe, impair et gagne. Les jeux sont faits. Nadau n’écrit plus, il dessine, la main passe — et repasse. Noir insecte. Empreinte du sang. Puis sang d’encre car plus de couleur. Noir et blanc pour poser le silence, pour qu’il parle. En conduite forcée, jusque-là : cette musique des bouges de la Bastille puis du Golf Drouot. Saccades, mouvements. Chant des limites. Contre l’étouffement. Any time a day. Any time a night. Pour retourner dedans.       Voir ce qui en tombe ou chuinte.
          Ce qui tend le dess (e) in. Coup de haches pour les repères et tuyaux dans la tête. Ne reste que du noir pour caviarder le néant. Un trop plein — pas de délié. Traces mais de quoi ? Courbes d’angoisse et point noir de fusion où ça se soude sans se reboucher. On soulève la peau on dégage la faible épaisseur de chair. Reste ce noir, cette tache de naissance.
          Ainsi le noir le blanc. Film policé ou crime parfait. Il y aura un ordre intérieur. Il y aura un son fondamental. (cri plutôt). De l’autre côté c’est le creux. C’est la jungle. L’abyme. Mais dedans aussi. Rien ne va plus. Les jeux sont faits. Plan obscur. Monopoly sans rue de la Paix. Le dessin ne produit que son propre dessein : ce tassement du fond. Existence fantôme et du fantôme. Répétition. Elle cède peu à peu : « je ne fuis plus, je m’exile, je m’attends » dit Nadau.
          Jean-Paul Gavard-Perret



UN SIPHON
Jean-Pierre NADAUblanc
JP Nadau SIPHONblancJP Nadau SIPHONblancJP Nadau SIPHONblancJP Nadau SIPHONblancJP Nadau SIPHONblancJP Nadau SIPHONblanc© Jean-Pierre Nadau SIPHON, encre de chine sur toile 1200X150 cm
Je cherche à donner une première impression d'ordre cosmique. Non pas un paysage cosmique inventé ou encore moins réaliste, mais un grand dessin qui fait songer à « quelque chose de cosmique ». J'ai réalisé « Siphon » entre 2012 et 2014. Tout comme certaines de mes autres grandes toiles, je cherche à faire une structure d'ensemble qui s'adapte au thème choisi. J'en fais pas mal jusqu'à ce que je trouve celle qui me satisfait. Alors je trace à une échelle donnée (ici 1/16e) cette structure finale puis je la rapporte sur la toile en grandeur réelle. Ensuite je remplis tout selon les idées que j'avais déjà établi, parfois vaguement ou plus précisément. Mais c'est souvent lorsque je dessine réellement que je trouve les « meilleures » J'ai fait ce dessin car je fais partie des gens qui ont une vision assez catastrophique et inéluctablement tragique de la destinée humaine, et je voulais l'exprimer plus clairement que d'habitude. De plus je dois dire que j'ai beaucoup pensé aux travaux des sociologues Michel et Monique Pinçon- Charlot dont j'apprécie la clairvoyance et leurs travaux très fouillés sur l'oligarchie.
Déjà il y a cette grande spirale qui couvre toute la surface […] point central aussi de l'ensemble de la composition qui représente notre mystérieux futur. Tout au long de cette spirale on y voit l'évolution de la vie, chronologiquement, de son apparition jusqu'à l'homo sapiens, toute une bonne partie de l'évolution des espèces… En alternance j'ai retranscrit les sons que produisaient ces « animaux » pour communiquer (du moins l'idée que je m'en fais) Quand on arrive à l'homme moderne, le développement et la sophistication des armes à travers les âges, remplace dans la suite de la spirale l'évolution des animaux […]. L'évolution de la pensée humaine est représentée par des Citations philosophiques.
          Jean Pierre Nadau 2014
↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓↓
Des livres de Jean-Pierre Nadau
Jean-Pierre NadaublancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NadaublancJean-Pierre NadaublancTirbouchon Jean-Pierre Nadaublanc© photos TP
Exuvies, recueil de 40 dessins, Préface de Gilbert Lascault - Éditions Culture Hors Sol
Fantaisie Hermétique sur les Courtines, textes et dessins - Éditions Le Galet
Le temple d'Yllitnahc - Éditions Le Saprophyte Acquis
Jockey Patron - Éditions Le Saprophyte Acquis
Les Turlupointus, vol. Il, recueil de 50 dessins - Éditions le Dernier Cri
Écritures d'Yllitnach - Éditions Culture Hors Sol, 2005
Fertilité et Grastronomie au XXIIIe siécle - Éditions Le Saprophyte Acquis
Le Boa Trouvé Lové - Éditions Le Saprophyte Acquis
Pulpe - Éditions Le Saprophyte Acquis
Tirbouchon - Éditions le Dernier Cri

















Google